vendredi 21 juin 2013

Du leadership et de son absence à Saint-Donat-de-Rimouski

Il aurait fallu sortir l'échelle!

Réponse inepte du directeur général Gil Bérubé 
à ma demande de mettre le drapeau de la municipalité en berne 
après la tragédie de Lac-Mégantic survenue le 6 juillet 2013.

 
 
Saint-Donat-de-Rimouski peine à identifier ses cul-de-sac. La rue Desgagnés débouche par la rue Lévesque. Or, un panneau de signalisation routière annonce à l'entrée le contraire. Quant aux rues Saint-Laurent, Hallé et des Loisirs, elles sont de vraies impasses dépourvues de toute indication. Cet confusion, cette absence de bonne direction, s'observe chez nous un peu partout. Voyez.

La main invisible


Le conseil municipal est au point mort. Les projets se font rares et les absences nombreuses. Le siège d'une ex-conseillère sera laissé vacant une année entière. Les idées grandioses de monsieur Pierre Gauthier semblent déjà appartenir au passé. Le conseil ne se réunit plus que pour donner un vernis légal aux décisions administratives du directeur général.

Pour justifier cette apathie, Michel Côté, maire de Saint-Donat et préfet de la MRC de La Mitis, hausse les épaules en expliquant que c'est partout pareil. Son irrésolution devient manifeste quand il se tourne à répétition vers Gil Bérubé, le directeur général, comme pour lui demander: «Qu'en penses-tu?» À Louis XVI qui lui demandait ce qu'il devait faire, Rivarol aurait répondu: «Faire le roi.» Misère!

Les rênes du pouvoir flottent. Comme la nature a horreur du vide, les fonctionnaires, qui expédient normalement les affaires courantes, prennent les choses en main. Vient une posture abracadabrante, technicienne et antidémocratique, où les élus règnent mais ne gouvernent plus. La notion de «gouvernance» traduit bien le processus par lequel le monde de la gestion finit d'avaler la souveraineté du peuple donatien(1).

La dépossession tranquille


J'ai prié le conseil dès octobre 2012 d'honorer la mémoire d'un des «pères du Mont-Comi (2)» et bâtisseurs de Saint-Donat: Étienne Caron (1915-2008). Cela devait avoir lieu le 8 juin à la Fête des Voisins. C'était avant que le directeur général ne prenne soudainement le parti de son ami Réjean Lévesque. Suivant un raisonnement simpliste, il allégua que le conseil ne pouvait aller de l'avant à «un contre un». Il s'arrogea la décision en mâchant tranquillement sa gomme. Pas mal pour un non élu!

Le DG se joue aussi du conseil sans remuer les lèvres. Nous sommes un petit village, or il ne souffla mot de mon projet aux Donatiens qui passent journellement à son bureau. On put presque jurer que ma demande n'ait jamais existé. J'en suis ulcérée.

Lecteur perspicace, vous songez peut-être à ce que fit alors Michel Côté? Rien. Démissionnaire à plus d'un titre, le maire ne réside plus à Saint-Donat. Cet homme mou fut indifférent à mes efforts en vue de faire connaître l'histoire locale.

Dernier appel


J'ai rencontré Gil Bérubé à dix jours de la Fête des Voisins pour m'enquérir de quelques développements. En effet, je n'avais pas eu de réponse officielle à ma demande officielle. Il affecta l'innocence. Compte tenu de ce qui vient d'être exposé, je le crois hypocrite. Bref, je lui transmis directement une copie de ma lettre envoyée à tous les foyers donatiens. Sitôt après, en prévision des Journées nationales de la culture, il forgea ce mensonge(3):

[L]a municipalité de Saint-Donat a déjà manifesté, par ses interventions [lesquelles?], sa volonté d'appuyer concrètement [un gros zéro] les initiatives qui visent l'affirmation de son identité culturelle et la participation active de ses citoyens à la vie culturelle (Procès-verbal de la séance du conseil du 3 juin 2013).

Il y a un an, un retraité de Cacouna qui avait acheté trois rôles d'évaluation municipal de Saint-Donat datant de 1879, 1929 et 1941 chercha à les vendre à la municipalité pour la somme rondelette de 300 dollars. Plutôt que de négocier, la directrice générale et secrétaire-trésorière adjointe lui conseilla de me joindre afin que je m'en porte acquéreuse. Je ne suis pas une mécène. Mon nom n'est pas Rockefeller. Ce patrimoine archivistique, sous la responsabilité de la municipalité, s'est évaporé aujourd'hui quelque part dans la nature...

La leçon


Si les élus se succèdent, le directeur général et secrétaire-trésorier reste et se taille en somme une position dominante dans l'appareil. L'histoire contemporaine nous enseigne, par exemple, qu'il suffit à Staline d'être secrétaire général de son parti pour se rendre maître de l'empire soviétique. De cette fonction, il sut pla cer ses créatures aux postes clés. Une vérité court toujours en 2013: le bureaucrate qui gère seul en permanence l'État - si gentil ou médiocre soit-il - dispose du pouvoir de mener sa politique personnelle. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois!

Je souffre de voir ma «petite patrie» ainsi avachit. Le citoyen doit s'intéresser à la chose publique. La parole est la première marque de l'engagement. Je me prends à espérer que le maire élu en novembre prochain saura revaloriser l'institution municipale s'il (ou elle!) assume l'ensemble de ses responsabilités et embauche un nouveau directeur général. Comme je l'ai illustré en introduction, il est temps que les Donatiens apprennent à identifier correctement un cul-de-sac lorsqu'ils en ont un sous les yeux!

Notes et références

(1) Pierre Lefebvre, «La gouvernance: un crime parfait. Entretien avec Alain Denault», Liberté, no 300, Été 2013, p. 57-61.
(2) Expression des journalistes Roger Boudreau, «Étienne Caron. L'un des ''pères'' du Mont-Comi!», L'Avantage, 24 septembre 2004 et Sonia Lévesque, «Décès de l'un des pères du Mont-Comi», L'Information, 24 février 2008.
(3) Gil Bérubé et la Municipalité n'ont jamais organisé d'activités dans le cadre des Journées de la culture. Par téléphone, Bérubé m'a assuré que ce n'était qu'une «façon de parler»!

À titre comparatif, le Comité de développement Val-Garnier de Saint-Charles-Garnier, une municipalité voisine trois fois moins peuplée, offre plusieurs activités aux Journées de la culture de septembre 2013:

- historique des croix de chemin; 
- visite du musée de la scie mécanique et expo de photos; 
- soirée folklorique et canadienne avec orchestre local 
(Le Mouton NOIR, vol. 19, no 1, septembre-octobre 2013, p. 8).

Article paru sur le site Internet du journal L'Avantage, Rimouski, 22 juin 2013.

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Épilogue

Plus ça change, plus c'est pareil.
Le désintérêt de la population permit à l'inamovible Gil Bérubé de désigner le maire.
À droite de kid kodak (Pascal Bérubé), enfoui sous ce Père Noël mal fagoté, à la bedaine croche,
 se cache le nouveau maire de Saint-Donat, Olivier Gillet.
Photo: Facebook de la municipalité de Saint-Donat-de-Rimouski, 16 décembre 2014.
Notez que ce cliché orna le profil Facebook de la Municipalité jusqu'à...la St-Valentin. Ho! Ho! Ho!

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Comment réforme-t-on un système pourri?

Suggestion de film

Brubaker (1980)

Photo: Amazon

Synopsis: «Un directeur de prison, soucieux d'améliorer la vie des pensionnaires de son établissement, a recours à des méthodes peu banales mais efficaces.

Arrivé incognito parmi d'autres détenus à la prison de Wakefield, Henry Brubaker observe et étudie ce qui se passe autour de lui. Il découvre un monde fait de brimades, de sévices et de corruption de la part des gardiens. Après quelques jours, il révèle sa véritable identité. Il n'est autre que le nouveau directeur, nommé par le gouvernement pour procéder à d'importantes réformes. Fort de son expérience, Brubaker se propose d'assainir Wakefield, d'en extirper les multiples violences. Mais les prévôts, qui eux-mêmes purgent leur peine, ne lui facilitent pas la tâche et voient avec inquiétude leurs prérogatives disparaître. La situation s'améliore cependant... (Wikipédia, page consultée le 7 février 2016).» 

samedi 1 juin 2013

Un rendez-vous manqué à Saint-Donat-de-Rimouski

Il y a dans les noms plus que de simples étendards onomastiques.
C'est la façon de s'afficher devant l'autre qui se joue,
à l'échelle des États comme à celle des groupes ou des individus.

FRANÇOIS-XAVIER FAUVELLE

Étienne Caron

La municipalité de Saint-Donat-de-Rimouski présente le 8 juin sa première édition de la Fête des Voisins. L'événement permet d'accroître le sentiment d'appartenance, de travailler ensemble à développer une communauté plus soudée et plus humaine, lit-on sur le site Internet de la Fête.

Il y a un lieu où les résidents de Saint-Donat se réunissent presque quotidiennement pour y célébrer les principaux rites (baptêmes, mariages, funérailles), la Fête nationale, accueillir les activités des aînés, voter aux élections ou tenir les séances du conseil municipal: le Centre communautaire L'Oasis. À ma demande, les édiles ont d'abord convenu de renommer à la Fête des Voisins l'édifice en «L'Oasis-Étienne-Caron».

Monsieur Étienne Caron (1915-2008) voua une bonne partie de son existence au service public. L'agriculteur de métier présida les destinées de Saint-Donat à un moment charnière de son histoire (1953-1981) ainsi que les fêtes entourant le 125e anniversaire de la municipalité en 1994. Il fut des luttes du Canada français, de tous les organismes à part le Cercle des fermières! Il ne fit évidemment pas l'unanimité. La politique est par définition un espace où s'exerce le pouvoir et s'aménage les conflits.

Caroline St-Laurent, «Le monde municipal bas-laurentien au milieu du XXe siècle.
Une histoire de vie: Étienne Caron (1915-2008)», L'Estuaire, no 70, juin 2010, p. 24-29. ISSN: 1484-6969.
Article disponible sur Sémaphore, le dépôt numérique de l'Université du Québec à Rimouski.



Les éteignoirs
Mais voilà, il suffit qu'un citoyen s'oppose pour que les membres du conseil jettent l'éponge sans plus amples consultations. Monsieur Réjean Lévesque, qui siégea au conseil municipal durant sa dernière année à la mairie et orchestra sa défaite en 1981, reste 32 ans plus tard son principal et irréductible adversaire. Tout au plus, accepterait-il une reconnaissance par les propriétaires actuels du Parc du Mont-Comi. Cette entreprise privée est libre de ses choix. Toujours est-il que la municipalité se doit de faire quelque chose, car c'est à l'identité donatienne que le plus mémorable de ses élus fut associé. Si les Bérubé, les Côté, les Hallé et les Lévesque se voient ça et là dans la toponymie, la famille Caron qui s'enracine dans ce coin de pays n'apparaît nulle part.

À la séance du 4 février, le retraité baby-boomer est intervenu, pas une, mais deux fois, pour s'assurer que le projet d'une jeune avorte. Étienne Caron aurait été contre l'achat de L'Oasis. À cela, je réponds qu'il n'était plus maire depuis 15 ans! Économe devant l'Éternel, il voudrait plus que tout aujourd'hui rentabiliser l'investissement. Toujours en verve, le citoyen brandit le spectre de morts se retournant dans leur tombe. Je m'intéresse aux vivants. Ainsi, les résidents de Saint-Donat peuvent connaître mes efforts et s'approprier leur histoire depuis 2010 en consultant le site Internet de la municipalité.

Le maire Étienne Caron est remercié par le ministre des Affaires municipales
et futur Premier ministre du Québec, Jacques Parizeau.
Photo: Gracieuseté de Martin Desjardins

L'effritement du monde commun

Voici le tableau: l'addition de un et un n'offusque pas monsieur Lévesque à condition de ne jamais donner deux! Les mêmes conseillers, qui passèrent outre les admonestations de ce dernier concernant la toile de la patinoire, s'en lavent aujourd'hui les mains. Vous connaissez maintenant l'absurde quadrature du cercle par laquelle un conseil irrésolu, indifférent à mon travail, bloque l'expression d'un hommage légitime.

Nous revenons à la case départ. Et pourquoi ne pas ajouter à L'Oasis le nom d'une petite vedette locale au nombril percé tant qu'à être frileux et superficiel? Un village festif, préoccupé par la seule consommation de l'instant présent, à l'image d'une société aseptisée, fuyant toute épaisseur culturelle, toute pesanteur historique, par crainte de heurter les susceptibilités, mais aussi par mauvaise conscience. À l'heure où la transmission du patrimoine québécois n'est pas assurée, les nouveaux arrivants ont toutes les raisons de croire que nous sommes une «page blanche», une banlieue-dortoir sans personnalité, où certains, à commencer par le maire (Le Jaseur, février 2010), révèlent envoyer leurs enfants directement à l'école anglaise!

Saint-Donat-de-Rimouski deviendra-t-il
 un «village Potemkine»?
Photo: Gregor Sailer


Face à cette régression collective, cette barbarie douce, il ne me reste qu'un atout. La population est plus instruite que jamais. J'ose croire qu'en m'adressant à son intelligence nous sauverons ce qui peut encore l'être. La conscience historique est une vertu citoyenne. Elle inspire souvent l'héroïsme, le courage, le sentiment du devoir.

Étienne Caron marqua son époque. Ah oui, j'oubliais, il était un conservateur, figure honnie de l'arriéré pour son détracteur infatigable. Est-ce un crime suffisant pour lui interdire droit de cité? Les Donatiens et les Donatiennes qui l'ont plébiscité pendant 28 ans devaient l'être aussi un peu. Vox populi, vox Dei! Un peuple qui rejette son passé n'a pas d'avenir. Finalement, je préfère citer un autre Lévesque, René de son prénom: «Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de dire à la prochaine fois».

«Nous souhaitons que l'élan que vous avez donné à l'épanouissement de notre milieu et que vous avez si bien amorcé, se poursuive au-delà de notre génération.» - Hommage d'un citoyen lors de son 25e anniversaire à la mairie le 30 septembre 1978.

Article paru sur le site Internet du journal L'Avantage de Rimouski le 30 mai 2013.

Un oasis sans nom à Saint-Donat-de-Rimouski
Photo: Site Internet de la municipalité
Nota bene

Si j'avais voulu faire publier ce texte dans le journal municipal (Le Jaseur), tous les obstacles auraient été réunis pour me barrer la route: longueur, saison estivale, etc. Aussi c'est à mes frais que je me résolus à le diffuser par la poste à tous les foyers donatiens.